Classification des psychotropes • Généralités sur les antidépresseurs • Variétés des antidépresseurs • Classification chimique et biochimique • Indications • Contre-indications • Effets indésirables • Critères de choix d’un antidépresseur • Modalités de traitement
Classification des psychotropes
Historique
C’est en 1957 que le psychiatre français Jean Delay proposa la classification des substances psychotropes en 4 classes :
- les sédatifs ou psycholeptiques
- les psychodysleptiques
- les psychoanaleptiques
- les thymorégulateurs
Sédatifs
Étymologiquement psycholeptiques signifie « qui prennent la pensée ».
Nous trouvons dans cette classe les anxiolytiques (benzodiazépines), les somnifères et les neuroleptiques ou antipsychotiques.
Psychodysleptiques
Signifie « qui perturbent l’activité mentale ».
Dans cette classe, se trouvent principalement le cannabis et autres hallucinogènes qui n’ont pas de place en thérapeutique.
Psychoanaleptiques
Signifie « qui relèvent l’activité mentale ».
On y trouve les stimulants (amphétamines et stimulants de l’éveil) et les antidépresseurs ou thymo-analeptiques (stimulants de l’humeur). Les antidépresseurs sont définis par leur aptitude à corriger l’humeur dépressive, voire à l’inverser (transformation en excitation euphorique).
Thymorégulateurs
Nouvelle catégorie apparue au cours des années 60 (sels de lithium). On les appelle aussi « psycho-iso-leptiques ». Ils sont capables de prévenir les récurrences maniaques ou excitation euphorique et dépressive (ou tristesse pathologique).
Généralités sur les antidépresseurs
Définition
Les antidépresseurs sont les médicaments des maladies dépressives. Au point que l’on a pu dire que la dépression est… ce qui guérit sous antidépresseurs.
En réalité, ils sont efficaces dans d’autres maladies que les maladies dépressives :
- les maladies anxieuses (trouble panique, phobies, troubles obsessionnels)
- certaines affections douloureuses (migraines, douleurs chroniques, algies vasculaires de la face, …).
En revanche, ils n’ont pas d’efficacité sur la tristesse non pathologique, ordinaire à certains moments de la vie : ce ne sont pas des pilules du bonheur.
Autres propriétés
Les antidépresseurs peuvent, selon leur origine, avoir d’autres propriétés :
- anxiolytiques : pour les antidépresseurs sédatifs ;
- stimulants : pour les antidépresseurs dits psychotoniques.
Ces effets latéraux apparaissent dès les premiers jours du traitement, alors que l’effet antidépresseur ne survient qu’après un délai de plusieurs semaines.
Variétés des antidépresseurs
Les antidépresseurs sont classés selon trois critères :
- structure chimique,
- actions biochimiques,
- spectre d’activité (le potentiel) : seul ce dernier critère est utile pour le choix thérapeutique.
Au début de l’histoire des antidépresseurs, on opposait deux familles :
- les inhibiteurs de la mono-amine oxydase (IMAO), définis par une action biochimique commune,
- les tricycliques, dérivés de l’imipramine, ayant une même structure chimique tricyclique.
Par la suite, sont venus s’ajouter les antidépresseurs de seconde et de troisième génération (ISRS, IRSNA) définis par leur action biochimique.
Classification chimique et biochimique
Les Inhibiteurs de la Mono-Amine Oxydase (IMAO)
Il en existe deux types : les classiques non spécifiques, dont l’action est irréversible (blocage de la MAO prolongé durant 15 jours) : iproniazide et les nouveaux IMAO A sélectifs, à action rapidement réversible.
Les tricycliques
Définis par leur structure chimique commune, les tricycliques dérivent d’une même molécule : l’imipramine.
Dans cette catégorie on retrouve :
- la clomipramine
- l’amitryptiline
- la desipramine
- la trimipramine
- la dosulepine
Les Inhibiteurs Spécifiques de la Recapture de la Sérotonine (ISRS)
Outre la fluoxétine, cinq autres de ces molécules existent sur le marché français :
- la fluvoxamine
- la paroxétine
- la sertraline
- le citalopram
- l’escitalopram
Les Inhibiteurs de la Recapture de la Sérotonine et de la Noradrénaline (IRSNA)
Cette catégorie compte deux molécules :
- la venlafaxine
- le milnacipran
Autres antidépresseurs
- la maprotiline
- la miansérine
- la mirtazapine
- la tianeptine
Indications
Généralités
L’indication commune à tous les antidépresseurs est la dépression de l’humeur à un niveau pathologique en intensité et en durée, désignée sous le terme de : « épisode dépressif majeur » (c’est-à-dire caractérisé).
Cas particuliers
Certaines molécules ont obtenu une indication spécifiant « épisode dépressif majeur y compris les formes sévères ».
Certains antidépresseurs sont officiellement indiqués dans la prophylaxie des récurrences dépressives.
Certains antidépresseurs ont prouvé leur efficacité et obtenu une indication officielle dans le traitement d’affections psychiatriques autres que la dépression (trouble panique, anxiété généralisée, phobie sociale, trouble obsessionnel compulsif, troubles des conduites alimentaires, …).
Contre-indications
Situations à risques
Certaines situations nécessitent surveillance particulière lors de l’utilisation d’antidépresseurs.
Il s’agit de :
- maladie épileptique : différents antidépresseurs peuvent avoir un effet épileptogène ;
- maladie hépatique ou rénale pouvant modifier l’élimination des médicaments ;
- état de dénutrition avec hypoprotidémie. Cet état peut augmenter la fraction libre et donc active du médicament ;
- antécédents cardiovasculaires avec troubles du rythme cardiaque.
Tricycliques
Contre-indications des tricycliques imipraminiques et apparentés :
- Glaucome à angle fermé (maladie dégénérative du nerf optique)
- Hypertrophie de la prostate
- Insuffisance cardiaque
- Association aux IMAO
IMAO
Contre-indications des IMAO classiques :
- Glaucome à angle fermé (maladie dégénérative du nerf optique)
- Hypertrophie de la prostate
- Insuffisance cardiaque
Contre-indications des nouveaux IMAO : Association aux antidépresseurs sérotoninergiques.
ISRS et IRSNA
Contre-indications des ISRS : Association aux IMAO
Contre-indications des IRSNA : Association aux IMAO.
Effets indésirables
Généralités
La liste des effets indésirables est impressionnante.
Heureusement, la majorité de ces effets ne surviennent que très rarement (dans moins de 10% voire moins de 1% des cas).
Tricycliques
Effets indésirables des tricycliques :
- Sécheresse de la bouche, constipation, troubles de l’accommodation visuelle, sécheresse oculaire. Ces effets s’atténuent à la diminution de la posologie. La constipation peut être prévenue par la marche, une hydratation adaptée et une alimentation riche en fibres. La sécheresse de la bouche peut être corrigée en mâchant du chewing-gum ou en suçant un bonbon sans sucre.
- Troubles urinaires tels que dysurie (difficulté à uriner) ou rétention urinaire.
- Sédation, somnolence diurne voire confusion mentale chez le sujet âgé, troubles du sommeil (notamment avec les produits stimulants).
- Hypotension orthostatique (vertiges lors du passage de la position assise ou couchée à la position debout en rapport avec une chute de la tension artérielle). Cet effet peut être corrigé par l’absorption d’eau de Vichy.
- Tremblements qui disparaissent si on réduit la posologie.
- Crises convulsives.
- Sueurs nocturnes, troubles sexuels et troubles du rythme cardiaque.
- Prise de poids.
- Des accidents à type de chute brutale du taux des globules blancs dans le sang ont été rapportés.
- Des accidents à type d’hépatites toxiques sont rares.
IMAO
Effets indésirables des IMAO classiques : Les IMAO classiques ne sont guère utilisés aujourd’hui en raison des précautions particulières exigées par leur emploi et des risques d’interaction avec les aliments riches en tyramine (fromages fermentés, abats, bananes, chocolat, bière, aliments fumés) ou avec certains médicaments (antihypertenseurs et vasopresseurs, anesthésiques, antalgiques morphiniques).
Leurs effets indésirables potentiels sont :
- sueurs
- tremblements
- bouche sèche
- chute de la tension artérielle ou au contraire à-coup hypertensif
- hépatite toxique
Les nouveaux IMAO ont peu d’effets indésirables : céphalées et troubles gastriques et du transit intestinal
ISRS
Effets indésirables des ISRS :
- modification pondérale (perte ou prise de poids)
- troubles digestifs : nausées, diarrhée, perte d’appétit
- maux de tête, fébrilité anxieuse, tremblements
- troubles de la libido avec diminution de l’appétit sexuel
- syndrome sérotoninergique comprenant fièvre, sueurs, agitation, confusion, tremblement, rigidité musculaire et augmentation brutale de la tension artérielle.
IRSNA
Effets indésirables des IRSNA :
- augmentation ou au contraire chute de la tension artérielle
- maux de tête
- sueurs
- insomnie ou au contraire somnolence
- anxiété
Conclusion
Malgré la longue liste des effets indésirables possibles, les nouveaux antidépresseurs sont bien tolérés. Ceci explique leur large utilisation qualifiée par certains d’excessive.
Critères de choix d’un antidépresseur
Généralités
Tous les antidépresseurs ont montré leur efficacité dans le traitement des épisodes dépressifs caractérisés.
Cependant, certains symptômes « seraient » prédictifs d’une bonne réponse aux antidépresseurs, notamment : ralentissement psychomoteur, et la diminution de la réactivité émotionnelle et désintérêt pour l’entourage.
A l’inverse, une moins bonne réponse pourrait être prédite par une intensité dépressive trop faible ou au contraire trop sévère.
Critères individuels
La sélection d’une molécule particulière pour un patient donné dépend d’une grande variété de facteurs :
- notion d’une réponse positive ou négative à une molécule dans les antécédents ;
- nature des effets secondaires d’une molécule. Une pathologie somatique peut diminuer ou augmenter la toxicité de certains antidépresseurs. L’effet sédatif ou au contraire psycho-stimulant de l’antidépresseur peut être recherché et guider le choix ;
- coût journalier du traitement ;
- expérience du praticien avec une molécule donnée.
Cas particuliers
Si un autre trouble psychiatrique co-existe (co-morbidité), le choix peut se porter sur une molécule ayant une efficacité spécifique sur le trouble associé.
En cas d’échec d’un premier antidépresseur, le choix d’un autre produit se portera parmi les molécules appartenant à une famille différente.
Modalités de traitement
Délai d’action d’un antidépresseur
Le délai d’action correspond au temps mis par le traitement antidépresseur pour exercer son effet sur l’humeur dépressive : ce délai varie de trois à six semaines. Durant cette période, la personne déprimée peut ressentir une amélioration au niveau du ralentissement moteur, de la qualité du sommeil, de l’anxiété.
Durée du traitement
Le traitement d’un épisode dépressif majeur implique trois phases :
- Traitement de la phase aiguë : il dure de trois à six semaines (délai d’action de l’antidépresseur).
- Phase de consolidation, qui dure trois à quatre mois au cours desquels le traitement antidépresseur est poursuivi à pleine dose.
- Phase de maintenance : sa durée dépend de la persistance de symptômes résiduels ou de la présence d’antécédents dépressifs ou de traits particuliers de personnalité augmentant le risque de récidives. Actuellement, il n’existe pas de consensus sur la durée de cette phase ni sur la dose à laquelle le traitement antidépresseur doit être administré.
Dans certains cas, un traitement « prophylactique » sera instauré.
Même lorsque l’épisode dépressif peut être considéré comme guéri, en fonction des antécédents du patient, le médecin peut être amené à prescrire un traitement pour une longue durée, à titre de prophylaxie, c’est-à-dire de prévention des récidives.
Arrêt du traitement
L’arrêt d’un traitement antidépresseur se fait par diminution progressive de la posologie, en surveillant attentivement la réapparition éventuelle de symptômes dépressifs.
Il n’existe pas de dépendance aux antidépresseurs.
En revanche, un arrêt trop brutal ou prématuré peut conduire à un syndrome de sevrage ou à une rechute.