Plus de 3 millions en France et 300 millions de personnes dans le monde sont touchées par la dépression. Parmi les nombreux facteurs expliquant sa survenue, ceux relevant de la génétique ne sont pas toujours mis à jour. Dans ce champ de recherche très complexe, mais porteur d’espoir pour les malades, des membres de l’Université centrale de Floride viennent de dévoiler un nouveau gène impliqué dans la prédisposition à la dépression.
Un nouveau lien entre génétique et dépression
Dans cette étude, publiée dans la revue scientifique Journal of Clinical Psychiatry, les chercheurs ont repris les données médicales et génétiques de plus de 3 000 personnes âgées entre 53 et 71 ans et suivies pendant plusieurs années dans le cadre d’une autre étude portant sur la santé des personnes diplômées des écoles secondaires de l’Etat américain du Wisconsin. En analysant l’ensemble de ces données biomédicales, l’équipe de chercheurs a constaté qu’une variante du gène ApoE, présente sur le chromosome 19 et nommée ApoE4, est impliquée positivement dans la survenue de la dépression.
A savoir ! Tout gène peut avoir plusieurs variantes ou versions qui déterminent l’apparition de caractères héréditaires différents.
Chez 25% de ces participants, les chercheurs ont observé que la présence du gène ApoE4 augmentait de 20% leur risque de développer à long terme des symptômes dépressifs. Les personnes n’ayant pas cette variante du gène ApoE, mais la variante ApoE2 ou ApoE3, ont, quant à elles, un moindre risque de souffrir de cette maladie psychosomatique, très contraignante à supporter au quotidien.
Selon le co-auteur de l’étude qui s’est confié dans les colonnes du magazine américain Reader’s Digest, Daniel Paulson : « Ce gène peut être un indicateur du développement futur de la dépression, mais cela ne veut pas nécessairement dire que le posséder entraînera automatiquement l’apparition de la maladie. »
ApoE4, une molécule clé dans les processus cognitifs
Finalement, quelles sont les connaissances actuelles sur ce gène ApoE ?
Depuis le milieu des années 1990, l’ApoE est reconnu comme un agent neuroprotecteur, dans la mesure où cette protéine transporte les lipides nécessaires à la réparation des cellules nerveuses (neurones).
D’après la littérature, le gène ApoE est responsable de la synthèse d’une protéine constitutive des lipoprotéines (soit une molécule combinant une molécule lipidique à une protéine), les apolipoprotéines E. Ce sont des macromolécules chargées de transporter des molécules hydrophobes dans le sang et les milieux aqueux du corps. Ces apolipoprotéines de type E, un type d’apolipoprotéine parmi les sept existants, sont essentielles pour les mécanismes responsables du transport du cholestérol vers le foie et dans la circulation sanguine.
En parallèle de cette étude, la variante génétique de l’ApoE, ApoE4, est également connue pour favoriser l’athérosclérose, une maladie très fréquente touchant les artères, et aussi, pour jouer un rôle important dans l’apparition de la maladie d’Alzheimer chez les populations occidentales.
Aujourd’hui, les études scientifiques montrent que :
- 60% de la population a deux allèles, ou variantes, ApoE3. Dans ce cas, le risque de voir apparaître la maladie d’Alzheimer, après l’âge de 80 ans est de 25%.
- Les personnes ayant l’allèle ApoE2, caractérisé comme un allèle protecteur, ont un risque plus faible de développer la maladie comparativement aux individus ayant les autres allèles. Environ 10% de la population a une copie de l’ApoE2 et une copie de l’ApoE3. Environ 0,5% a deux copies de l’ApoE2.
- 25% de la population a une copie de la variante ApoE4. Dans ce cas, le risque de souffrir de la maladie d’Alzheimer est 5 fois plus élevé que chez ceux ayant les 2 allèles ApoE3 et la maladie se déclare généralement à un plus jeune âge.
- Environ 2% de la population possède deux variantes du gène ApoE4. Les risques sont ici de 8 à 12 fois plus élevés comparativement aux porteurs de 2 allèles ApoE3.
Récemment, des chercheurs du laboratoire de l’université de Tel-Aviv ont découvert que la protéine produite par le gène ApoE4 se lie à une moindre quantité de matières grasses que celles produites par la version correcte du gène ApoE3.
L’apolipoprotéine de type E4 joue donc un rôle crucial dans l’apparition de troubles cognitifs, comme la dépression et la maladie d’Alzheimer, et constitue une cible prometteuse pour le développement de futurs médicaments.
Julie P., Journaliste scientifique
– ABCA1 Agonist Reverses the ApoE4-Driven Cognitive and Brain Pathologies. Journal of Alzheimer’s disease. Anat Boehm -Cagan et al. DOI: 10.3233/JAD-160467. 2016. – Consulté le 25 août 2017.