Les médicaments possèdent tous des effets secondaires indésirables. Mais quels types de traitements pharmaceutiques seraient enclins à nous faire tomber en dépression ? Une équipe de chercheurs s’est intéressée à cette question et vient de montrer que plus de 37 % des Américains prenant des médicaments n’ayant rien à voir avec les troubles de l’humeur voient leur risque de dépression augmenté sous l’effet de ce traitement.
Plus de médicaments, plus de risque de déprimer
Afin de mesurer ce lien entre traitement médicamenteux (avec ou sans ordonnance) et risque de dépression, les chercheurs de l’université de l’Illinois à Chicago et de l’université de Columbia de New-York se sont basés sur une enquête nationale sur la santé et la nutrition menée aux Etats-Unis entre 2005 et 2014 et portant sur 26 192 participants dont l’âge moyen était de 46 ans.
En analysant les données, les chercheurs ont mis en évidence que :
- 37, 2 % des participants avaient pris un médicament ou plusieurs médicaments dont l’un des effets indésirables était le risque de survenue de dépression ;
- 15 % des personnes prenant au moins trois médicaments avec un effet indésirable de survenue de dépression souffraient effectivement d’une dépression contre seulement 7 % dans le groupe de personnes ne prenant qu’un seul type de ce genre de médicament et 5 % dans celui regroupant les personnes ne prenant pas de médicaments avec ce type d’effets indésirables ;
- 200 médicaments couramment utilisés augmentaient la probabilité de devenir dépressif.
Les classes de médicaments les plus rencontrées
En s’intéressant aux classes de médicaments induisant potentiellement un effet dépressif, les chercheurs se sont aperçus que ceux qui revenaient constamment étaient :
- Les contraceptifs hormonaux ;
- Les médicaments pour l’hypertension artérielle (HTA) comme le métoprolol et l’aténolol ;
- Les analgésiques (médicaments antidouleurs) ;
- Les médicaments traitant la toux (comme l’hydrocodone) ;
- Les médicaments pour contrôler les remontées acides de l’estomac (reflux gastro-oesophagien (RGO) comme l’oméprazole.
« Beaucoup seraient surpris d’apprendre que leurs médicaments, bien que n’ayant rien à voir avec l’humeur, l’anxiété ou tout autre état normalement associé à la dépression, peuvent augmenter leur risque d’avoir des symptômes dépressifs et mener à un diagnostic de dépression » souligne Dima Qato, l’auteure principale de l’étude.
Perspectives de cette étude
Par ailleurs, les chercheurs précisent que leur analyse statistique permet de mettre en relief des corrélations et non une relation de cause à effet entre prise de médicaments et dépression. Pour eux, la consommation de plusieurs médicaments est associée « à une plus grande probabilité de dépression ». Ils regrettent donc que les données de l’enquête nationale ne prenaient pas en compte les antécédents de dépression des volontaires.
Aussi, il ne faut pas perdre de vue que la majorité des personnes prenant un traitement polymédicamenteux ont une santé physique plus fragile et que ceci peut également potentialiser la survenue de la dépression.
Pour aller plus loin, les chercheurs devront intégrer, dans une nouvelle étude, le passif dépressif de la population étudiée et analyser plus finement le lien de cause à effet de chaque médicament et de l’association de plusieurs médicaments.
Par ailleurs, ils recommandent vivement aux médecins généralistes ou spécialistes :
- De discuter avec leur patients de la possibilité de survenue d’une dépression avec la prise de leur traitement ;
- De suivre plus attentivement le comportement psychologique du patient pendant sa thérapie médicamenteuse.
Aussi, ils recommandent d’intégrer ces données d’habitudes de consommation de médicaments dans les stratégies de santé publique luttant contre la dépression.
Julie P., Journaliste scientifique
– Prevalence of Prescription Medications With Depression as a Potential Adverse Effect Among Adults in the United States. Jamanetwork. Consulté le 17 Juin 2018.
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