De nombreuses études ont récemment démontré que la Covid-19 pouvait nuire à la santé mentale de la personne infectée avec un risque accru de dépression, d’anxiété ou de troubles du sommeil. Mais s’il existait également un lien entre l’état psychologique initial du patient et le risque de symptômes prolongés de la Covid-19 ? C’est ce que suggère une nouvelle publication publiée dans le Jama Psychiatry.
Santé mentale et Covid long
En juin dernier, l’Académie nationale de médecine plaidait pour un meilleur suivi des conséquences neurologiques et psychiatriques des Covid longs. De nombreuses études ont en effet récemment démontré que la Covid-19 pouvait nuire à la santé mentale de la personne infectée avec un risque accru de dépression, d’anxiété ou de troubles du sommeil. Mais jusqu’à présent, peu d’études ont exploré la relation entre l’état psychologique initial du patient et le risque de symptômes prolongés.
Et s’il existait effectivement un lien entre l’état psychologique initial du patient et le risque de symptômes prolongés de la Covid-19 ? C’est ce qu’a cherché à savoir une équipe de scientifiques américains de l’école de santé publique Harvard TH Chan de Boston.
Pour mener à bien leurs recherches, les scientifiques ont étudié entre avril 2020 et novembre 2021 une cohorte prospective de 54 960 participants élaborée à partir des données de trois cohortes existantes (Nurses’ Health Study 1 et 2 et Growing Up Today Study). Ces trois cohortes étaient composées à 96,6 % de femmes professionnelles de santé. Et les participants ne devaient pas avoir été infectés par le Sars-CoV-2 avant le début du suivi. Des auto-questionnaires réguliers ont ensuite permis aux scientifiques de prendre en compte une potentielle infection Covid-19 au cours du suivi, la préexistence ou non de troubles psychologiques ainsi que la persistance des symptômes de la Covid-19.
La détresse psychologique : un facteur de risque de Covid long
Il en ressort que 6 % des participants ont été infectés par le Sars-CoV-2 au cours du suivi et que 40 % d’entre eux ont présenté des symptômes prolongés (d’une durée d’au moins quatre semaines). Les scientifiques ont alors constaté que les personnes qui étaient le plus susceptibles de souffrir de symptômes prolongés au-delà de quatre semaines après une infection par le Sars-CoV-2 étaient celles qui s’étaient déclarées anxieuses, déprimées, stressées, ou celle ayant simplement nourri de l’inquiétude vis-à-vis de la Covid-19 !
Une détresse psychologique avant l’infection serait donc associée à un risque accru de symptômes prolongés de la Covid-19 :
- Dépression associée à un sur-risque de 32 %
- Anxiété associée à un sur-risque de 42 %
- Stress associé à un sur-risque de 46 %
- Inquiétude face à la Covid-19 associée à un sur-risque de 37 %
- Sentiment de solitude associé à un sur-risque de 32 %.
Plus encore, les chercheurs ont observé une « relation dose-effet » entre l’intensité des troubles psychologiques existants et le risque de symptômes prolongés post-Covid. Les participants présentant au moins deux formes de détresse pré-infection présentaient par exemple un risque de symptômes prolongés de la Covid augmenté de moitié par rapport aux autres participants.
Vers une meilleure compréhension des mécanismes impliqués
Pour tenter d’expliquer ce phénomène, les auteurs pensent qu’il existerait un lien entre la santé psychologique du patient et l’inflammation systémique (via les cytokines inflammatoires). Cette hypothèse s’appuie sur des études ayant démontré que les patients en état de détresse psychologique au moment de l’infection ont tendance à souffrir d’épisodes infectieux plus longs et plus intenses.
À savoir ! Les cytokines inflammatoires désignent des molécules responsables du processus d’inflammation indispensable pour lutter contre la dissémination des éléments pathogènes dans l’organisme.
Les chercheurs conviennent néanmoins que des investigations plus approfondies restent indispensables pour décrypter les mécanismes biologiques et comportementaux associant détresse psychologique perçue et risque de symptômes prolongés de la Covid-19.
Nul doute que ces travaux inciteront la communauté scientifique à creuser la piste inflammatoire et à mieux définir l’impact de l’état psychologique initial des patients sur le risque de symptômes prolongés d’une infection quelle qu’elle soit !
Déborah L., Docteur en Pharmacie
