Causes de la dépression


Théorie psychanalytique Facteurs identifiés Facteurs prédisposants et précipitants Un déterminisme complexe

Théorie psychanalytique

Introduction

Pour rappel : Freud a proposé une lecture du fonctionnement psychologique en imaginant des structures mentales telles que le Moi (assurant l’adaptation de l’environnement), le Ça (expression des instincts et pulsions), le Surmoi (instance morale régulant le fonctionnement du Moi et du Ça).

Selon la théorie freudienne, la dépression est assimilable à une perte d’objet : il est vrai que rien ne ressemble plus à une dépression qu’un état de deuil. Le déprimé éprouve outre la tristesse un sentiment de culpabilité qui exprimerait la tyrannie du Surmoi (instance morale) consécutivement à l’interjection destructive de l’objet d’amour. Ainsi pourraient s’expliquer l’auto-agressivité et le risque suicidaire.

Théorie cognitive

Cette théorie met en avant le fait que des idées négatives (sur soi, sur l’environnement) peuvent avoir valeur de facteurs dépressogènes. Ainsi existerait-il des sujets ayant des schémas de pensées trop systématiquement pessimistes qu’il convient de rééduquer : en les repérant et en apprenant à les corriger. Cette théorie est surtout validée par l’efficacité des thérapies cognitives dans les formes dépressives d’intensité modérée.
pessimisme

Théorie biologique

Certains résultats font supposer que les sujets présentant un trouble dépressif ont trop ou pas assez de neuromédiateurs, substances chimiques libérées par les neurones (noradrénaline, dopamine, sérotonine) dans certaines régions du cerveau.

Par exemple, une déficience en sérotonine peut causer : troubles du sommeil, irritabilité, anxiété, impulsivité suicidaire.
Une diminution de la noradrénaline peut contribuer aux symptômes de fatigue et perte d’initiative.
Un déficit en dopamine peut induire émoussement des sensations de plaisir, ralentissement psychique et moteur.
Les anomalies de la sécrétion de cortisol existent chez 50 % des déprimés. Le cortisol est produit par la glande surrénale (qui se trouve au niveau des reins), avec des pics de sécrétion en réponse au stress, à la peur ou la colère. En outre, le niveau de cortisol subit des fluctuations au cours de la journée avec un pic le matin après le réveil. Chez les sujets souffrant de dépression, le pic de cortisol survient plus tôt le matin, restant à un niveau élevé. L’administration de cortisol synthétique (dexaméthasone) freine normalement la sécrétion de cortisol naturel sauf chez les déprimés.

Il n’est pas établi que ces perturbations sont à l’origine de la dépression : elles peuvent en être la conséquence. Par exemple, les niveaux de cortisol se modifient peut-être lors de la dépression comme au moment d’un stress.

Facteurs identifiés

Le stress

Les stresseurs psychosociaux et environnementaux sont des facteurs tantôt prédisposants tantôt précipitants. Il existe une relation entre niveau élevé de facteurs de stress et déclenchement d’une dépression. Par contre, les épisodes récidivent souvent sans facteurs déclenchants : comme si étant initiée, la dépression pouvait évoluer sans déclencheur.

stress

La génétique

On sait désormais qu’il n’existe pas un gène de la dépression. Par contre, le terrain génétique a une influence dans le déterminisme de ces maladies :

  • les parents au 1er degré d’un déprimé (parents, frères et sœurs, enfants) sont plus souvent atteints que la population générale ; à titre d’exemple, dans la forme la plus « héréditaire » qu’est la maladie bipolaire : 1 % de la population générale est atteint, 10 % des parents au premier degré : le risque est donc multiplié par 10 !
  • chez les jumeaux monozygotes ou vrais jumeaux : lorsque l’un est atteint, la probabilité que l’autre le soit également est de 50 % ; chez les jumeaux dizygotes ou faux jumeaux cette probabilité diminue à 30 %.

Plusieurs territoires du génome sont identifiés comme étant susceptibles de transmettre une vulnérabilité à la dépression : ils sont localisés sur différents chromosomes (X, 7, 11…).

Facteurs toxiques

L’alcool est dépressogène : alors que son usage ponctuel peut produire un effet de bien-être, son usage répété finit par favoriser l’émergence de symptômes dépressifs.
Lors d’un sevrage de quelque toxique (alcool mais aussi tabac, cannabis, héroïne) des symptômes dépressifs sont fréquents, éventuels facilitateurs d’une reprise de l’intoxication.

problème d'alcool

Médicament

Certains médicaments antihypertenseurs, les corticothérapies, certains traitements immunitaires (interféron), les thérapeutiques hormonales ne sont pas recommandés chez les sujets présentant des antécédents de dépression, en raison de leurs possibles effets dépressogènes.

Facteurs sociaux

La dépression existe dans toutes les sociétés y compris traditionnelles. L’éclatement des structures familiales, le déficit de spiritualité peuvent faciliter une perte des repères sollicitant davantage de capacités d’adaptation. Ceci peut faciliter l’émergence de symptômes dépressifs.
éclatement des structure familiale

Facteurs somatiques

Chez la femme, un changement de statut hormonal peut être contemporain d’états dysphoriques (instabilité de l’humeur, anxiété…) : pendant les phases prémenstruelles, en fin de grossesse, à la ménopause.

Toutes les maladies endocriniennes telles que hypothyroïdie, insuffisance surrénale… peuvent se révéler ou se compliquer d’un état dépressif. Ainsi, est-il assez fréquent de doser les hormones thyroïdiennes pour éliminer une dépression secondaire au trouble thyroïdien.

Les maladies neurologiques sont également susceptibles de s’annoncer par un état dépressif : tumeur cérébrale, maladie dégénérative (sclérose en plaques, maladie de Parkinson, maladie d’Alzheimer), maladie vasculaire.

Des maladies de l’immunité telles que les maladies de système (lupus érythémateux disséminé, polyarthrite rhumatoïde …) sont souvent compliquées par une dépression. Il en est de même des maladies virales (HIV, hépatites virales …).

Les maladies chroniques, en particulier la douleur chronique, sont dépressogènes.

Troubles psychiatriques associés

L’anxiété chronique, dite anxiété généralisée, se complique d’un trouble dépressif dans près de 70 % des cas.

Les autres troubles anxieux comme le trouble panique (répétition d’épisodes d’angoisse brutale et sévère avec crainte secondaire de survenue de ces crises de panique), le trouble obsessionnel compulsif, la phobie sociale s’accompagnent d’un risque accru de trouble dépressif.

alcool

Chez l’adolescent ou l’adulte jeune, le trouble schizophrénique peut débuter par une dépression.

Chez l’homme, la maladie alcoolique est plus souvent une cause de dépression que la dépression n’est à l’origine de l’alcoolisme ; chez la femme, c’est l’inverse : la dépression est une cause des abus d’alcool qu’il faut savoir identifier.

définitionTrouble obsessionnel compulsif : Affection qui se caractérise par la présence d’obsessions (idées que le sujet sait absurdes, dont il ne peut pas se débarrasser : peur d’une contamination, besoin d’ordre ou de propreté, …) et/ou compulsions (actes ou comportements à répétition, inutiles que le sujet se sent obligé d’accomplir : se laver souvent les mains, accomplir des gestes ou dire des mots absurdes et jugés comme tels).

Troubles de la personnalité

Une personnalité est dite pathologique dès lors que plusieurs traits sont fixes, permanents et sources de souffrance pour le sujet ou son environnement.

On distingue aujourd’hui trois ensembles de personnalités pathologiques :

  • les personnalités de la série névrotique (hystérique ou hyperémotive et théâtrale, évitante ou dépendante, obsessionnelle) ;
  • les personnalités intermédiaires avec des conduites plus ou moins impulsives et antisociales ;
  • les personnalités de type psychotique (paranoïaque, schizoïde).

Toutes ces personnalités pathologiques ont des difficultés d’adaptation à leur environnement et sont susceptibles de ruptures dépressives avec risque suicidaire.

Facteurs prédisposants et précipitants

Introduction

Il faut distinguer :

  • Facteurs prédisposants survenant plusieurs mois ou années avant l’éclosion de la dépression.
  • Facteurs précipitants qui apparaissent comme des déclencheurs de la maladie.

Facteurs prédisposants

Les facteurs prédisposants sont ceux qui, survenus tôt dans la vie, peuvent générer une condition de vulnérabilité : outre les facteurs génétiques, on connaît le rôle des traumatismes affectifs précoces (séparation, deuils, sévices durant l’enfance).

Facteurs précipitants

Les facteurs précipitants sont ceux qui participent au déclenchement de la maladie, étant survenus ou accumulés dans les 6 à 12 mois qui précédent l’apparition de la maladie (stress chronique, deuil, rupture affective, abus d’alcool).

Un déterminisme complexe

Un point à retenir : aujourd’hui nul ne connaît la cause d’une dépression.
Ce type de pathologie résulte d’une addition de faits :

  • vulnérabilité, soit innée (facteur génétique) soit acquise (facteurs prédisposants) ;
  • éléments de fragilisation tels que trouble de la personnalité, trouble de l’adaptation;
  • existence d’une pathologie somatique (endocrinopathie, maladie infectieuse, maladie neurologique…) ou psychique (trouble anxieux);
  • facteurs environnementaux tels que stress, rupture affective, situation sociale difficile… ;
  • rôle éventuel de toxiques (alcool/ou de médicaments (interféron, cortisone…).

La dépression est donc une maladie face à laquelle il importe d’identifier tous les facteurs qui ont pu y contribuer.