Même si cela reste rare, la dépression peut également toucher les nourrissons. C’est comme s’il naissait sans avoir un élan vital et sans avoir envie de découvrir le monde. Quels sont les symptômes de cette dépression infantile? Quelles sont les situations à risques ? Et enfin, comment soigner ce trouble psychologique chez un tout-petit ? Eclairage.
Repérer la dépression du nourrisson
Comme pour les adultes, la dépression chez l’enfant reste sous-évaluée. Il est difficile de s’imaginer qu’un enfant qui vient de naître ou celui qui a entre 2 et 5 ans, puisse développer une maladie dérégulant son humeur.
Cependant, et comme chez tout adolescent ou adulte, le bébé ressent des douleurs morales et du bien-être psychique. Si l’état de mal-être psychique persiste dans le temps, le bébé devient déprimé.
Cette notion de dépression du nourrisson a été conceptualisée dès 1946 par le psychanalyste René Spitz autour des phénomènes induits chez des nourrissons en pouponnière par la privation de leurs mères.
D’ailleurs on ne parle pas de dépression majeure chez un bébé, mais plutôt d’une « tendance à être triste ».
Progressivement, l’enfant de 0 à 5 ans va :
- Refuser progressivement d’interagir ;
- Perdre l’envie du jouer ;
- Etre passif par rapport à son environnement ;
- Présenter des troubles anxieux fréquents (sensibilité, tristesse, nervosité, pleurs) ;
- Souffrir d’une psychomotricité réduite ;
- Subir une désorganisation psychosomatique avec une sensibilité accrue à certaines maladies ou certains troubles (pathologies ORL, troubles intestinaux, troubles du sommeil etc.) et perte d’appétit ou, plus rarement, boulimie ;
- Présenter des troubles de développement moteurs et cognitifs.
L’objectif ici est de repérer rapidement ces symptômes pour aller consulter un pédopsychiatre ou un psychologue qui fera le diagnostic et mettra en place, si besoin, un traitement adapté.
« En identifiant la dépression le plus tôt possible et en aidant les enfants à changer la façon dont ils traitent leurs émotions, nous croyons qu’il est possible de changer la trajectoire de la dépression », souligne dans un communiqué Joan Luby, chercheuse en psychiatrie infantile.
Repérer les événements traumatisants pouvant fragiliser l’enfant
Certains facteurs peuvent favoriser le développement d’une dépression chez l’enfant.
Ainsi, il a été montré que si l’un des parents souffre d’une dépression, comme une dépression périnatale (avant et après la grossesse (dépression post-partum) chez la mère, le nouveau-né a plus de risque de souffrir de troubles de l’humeur, voire d’une dépression.
Certains évènements vont favoriser la survenue de l’état dépressif chez le bébé comme :
- La perte d’une ou de l’une des figures d’attachement (mère, père, grands-parents, nourrices) ;
- Une hospitalisation plus ou moins longue ;
- Des facteurs héréditaires de vulnérabilité ;
- Les conditions de la vie intra-utérine et de l’accouchement ;
- L’altération des soins maternels (carence d’apport affectif, de soins, de stimulations) et les troubles de la personnalité de la mère ou de la figure affective (modifications brutales des humeurs, imprévisibilités) ;
- La maltraitance.
A Savoir ! Les enfants qui étaient placés en institutions, avec une absence de figure maternelle de référence et un cantonnement aux soins d’hygiène et de nourrissage, développaient l’hospitalisme. Autrement dit, une forme extrême de la dépression du nourrisson caractérisée par une passivité, un immobilisme, une absence d’expression et de réactions. Parfois, ils présentaient une agitation avec des mouvements étranges et répétitifs.
Comment soigner une dépression chez les tout-petits ?
Les professionnels de la petite enfance valorisent plutôt une intervention auprès de la famille et du cercle social de l’enfant.
Les différents intervenants (pédopsychiatre, infirmière puéricultrice, travailleur social, etc.) vont aider les parents, ou la famille d’accueil, à :
- Identifier le caractère du bébé pour se rassurer sur leurs compétences parentales et rester plus attentifs aux signes du bébé ;
- Adapter leurs attitudes selon le tempérament de l’enfant et son style d’interaction;
- Mettre en place un réseau d’aide (famille, amis, nourrices) pour pouvoir trouver du répit ;
- Se munir d’outils pour intervenir auprès de l’enfant déprimé.
Même s’il est difficile de concevoir qu’un nouveau-né ou qu’un enfant de moins de trois ans peut souffrir de dépression, il faut avoir conscience de cette possibilité. Un diagnostic précoce est synonyme d’une guérison plus rapide pour l’enfant.
Julie P., Journaliste scientifique
– La dépression du nourrisson – Ses relations avec la carence affective et les troubles des interactions précoces. Mt Pédiatrie. J.Dayan. Consulté le 17 décembre 2018.